Quelque soit la face par laquelle on choisira d’aborder le film Désigné coupable, la finalité qu’il traduit demeure ahurissante : un homme est resté emprisonné plus de quatorze ans dans le centre carcéral américain le plus opaque et sans le moindre jugement, implication ou fait établi.
Cet homme s’appelle Mohamedou Ould Slahi, mauritanien de naissance, dont Désigné coupable déroule le destin en s’appuyant sur Les Carnets de Guantánamo, le livre-témoignage que Slahi a écrit. En confiant les rênes de son adaptation à l’écran à Kevin Macdonald, les producteurs de Désigné coupable savaient, de par la minutie et le sens de la justesse que le réalisateur a toujours insufflés à ses longs-métrages (Le Dernier Roi d’Écosse) et documentaires (Un jour en septembre, Marley), que l’ensemble ne succomberait pas aux ficelles souvent tentantes dans les narrations cinématographiques mêlant politique, terrorisme et justice. Derrière ses atours de thriller, le film montre comment un pays peut aller jusqu’à oublier les principes de droit les plus basiques au nom d’une obsession pour la sécurité, exacerbée par des événements dramatiques, jusqu’à se montrer incapable d’appuyer à un moment sur la pédale de frein de ses dérives. Brillant !