L’intrigue est minimale et s’accorde pourtant parfaitement avec la durée d’un film à la beauté subtile, sorte de plongée sensorielle et métaphorique dans la conscience d’un homme pas franchement honnête. Hasan est un agriculteur aisé et retors qui inonde ses pommes de pesticide, n’hésite pas à racheter à vil prix les terres d’un voisin endetté ou à corrompre un juge pour éviter l’installation d’une ligne à haute tension sur son précieux champ de tomates.
Aussi, lorsque sa femme et lui sont tirés au sort pour accomplir le pélérinage à La Mecque qui fera de lui un hadji, il se met en tête d’expier ses fautes. Sa première visite à un cordonnier qu’il avait oublié de payer cache des blessures plus grandes, dont le lien durablement brisé avec son frère.
Le réalisateur de Milk et Miel filme la splendeur de la nature de cette région de Turquie avec une attention aux détails et aux sons qui font paraître encore plus dérisoires les petites misères et lâchetés humaines. Elle lui permet de composer des images comme autant de tableaux, allant du clair-obscur d’une tonnelle éclairée par le reflet d’un néon à la lumière franche d’un champ de blé desséché. Du grand cinéma en somme.
La Croix