« La pression pèse sur moi / Pèse sur toi, aucun homme ne demande ça / Sous pression, ça fait s’écrouler un immeuble / Ça divise une famille en deux (…) Je prie pour que demain soit pour moi un jour meilleur (…) Ne pouvons-nous pas nous accorder une dernière chance ? Pourquoi ne pouvons-nous pas donner à l’amour cette dernière chance ? Sous pression, sous pression, pression » Under Pressure, chanson de David Bowie et Queen.
Pour ne rien déflorer du climax du film, on ne vous dévoilera rien du lien qui existe entre cette chanson inoubliable du duo unique de Freddie et David et ce film en partie autobiographique d’une jeune réalisatrice irlandaise adoptée par New York… Commençons par dire que rarement un film, pourtant d’une grande simplicité apparente, aura autant fait rire et pleurer à la fois. Un film incroyablement juste et sensible sur la paternité, sur la relation père-fille, sur la force et la fragilité de ce lien, sur les efforts qu’il exige, sur les erreurs qui le mettent en danger… Nous sommes dans les années 90. Calum, la petite trentaine et fraîchement londonien, a pris une semaine de vacances avec sa fille de 11 ans, l’espiègle et impertinente Sophie, dans un de ces hôtels
« all inclusive » qui défigurent la côte touristique turque. Entre la préadolescente et le (trop) jeune père beau gosse que l’on prend parfois pour le grand frère, le contrat est clair :
l’objectif est de s’amuser entre les piscines, la mer d’azur, le buffet à volonté et les nombreuses animations proposées par ce genre d’établissement. On comprend rapidement que les parents sont séparés, que Sophie vit avec sa mère en Écosse et que Calum a bien l’intention de profiter à 200 % de ces petits moments privilégiés avec sa fille… Alors entre bronzette, blagues faites aux autres ados à la piscine, premières plongées magiques dans les fonds riches en poissons de la Méditerranée et ébauche de découverte des premiers sentiments amoureux pour un gentil garçon un peu bouboule rencontré à la salle de jeux vidéos, le film prend des tonalités estivales et légères. Une ambiance renforcée formellement par les images du caméscope que Sophie utilise sans modération, filmant tout et n’importe quoi mais surtout son père, à qui elle pose une foule de questions…
Mais derrière les images solaires, derrière les couleurs magnifiques des paysages turcs, on devine peu à peu chez ce père au comportement volontiers fantasque et inconstant une faille indéfinissable. Et peu à peu la mélancolie et une forme d’angoisse s’installent, et c’est toute la délicatesse avec laquelle la réalisatrice passe de la légèreté à la gravité qui fait de ce film une merveille bouleversante.
Utopia