Frank n’est pas du genre à avoir froid aux yeux. Cadre supérieur dans une entreprise de fret maritime, il enquille les heures sans sourciller, convaincu que la consécration ne passe que par le travail. Son quotidien bien huilé vole en éclats à la suite d’une situation de crise à bord d’un cargo. « Travailler plus pour gagner plus ». Qu’il semble avoir vécu, ce slogan capitaliste, à l’heure où on ne jure plus que par l’épanouissement personnel. Conférer à Frank cette maxime de vie, c’était l’assurance d’attirer sur lui une antipathie instinctive. Un choix judicieux car, paradoxe de la fiction oblige, les personnages de salauds sont toujours les plus intéressants. On se plait à mépriser la rigidité de ce cadre solitaire, sa routine de robot et ses décisions amorales. Frank est un Frankenstein moderne, un monstre en col blanc, qui peut changer le cours d’une vie depuis sa piscine en un coup de téléphone.
Le manichéisme est heureusement évité grâce à l’interprétation touchante d’Olivier Gourmet, qui parvient à exploiter finement les failles de son personnage. Un roulement d’yeux, un froncement de sourcils ou un silence appuyé suffisent à l’acteur pour rendre à ce stakhanoviste toute sa fragilité. Bravo !
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