Même s’il s’inspire directement des propres souvenirs d’enfance du réalisateur, L’Île rouge est moins un récit autobiographique que le tableau d’un monde perçu à travers la distorsion d’un regard d’enfant. Le film restitue magnifiquement cette perception propre à l’enfance, où la compréhension instinctive de ce qui se joue va avec l’impossibilité d’accéder aux causes et conséquences -politiques, psychologiques, factuelles...- qui pourraient l’expliquer. Tout ce qui est tu ou caché crée pour Thomas, le protagoniste, une vision indéchiffrable du monde qui l’entoure. Il compense alors par la perception sensible et sensuelle, l’observation et le recours à la fiction.
Voilà comment on fait des cinéastes, pense-t-on alors inévitablement. Car c’est bien de cela qu’est fait l’art : d’un regard inquiet et fasciné sur les mystères du monde, d’une attention exacerbée à tout ce qui fait indice, du développement d’un imaginaire pour combler les lacunes de l’explicable. Et en cela, L’Île rouge est du grand art.
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