Les crises ont ceci de bon qu’elles exhortent à se centrer sur l’essentiel. Depuis celle du Covid et ses confinements propices à l’introspection, plusieurs cinéastes ont réinterrogé leur art sous un angle intime et/ou ontologique : Steven Spielberg dans The Fabelmans (2022), Sam Mendes avec Empire of Light (2022) ou Arnaud Desplechin dans Spectateurs ! (2024). La Venue de l’avenir de Cédric Klapisch donne corps à la période charnière, passionnante à tous points de vue, qui a vu naître le cinématographe, l’impressionnisme, la psychanalyse, le déploiement du chemin de fer, l’arrivée de l’électricité, entre autres révolutions industrielles et culturelles. Ce regard rétrospectif fait écho à celui, prospectif, qui était le sien dans Peut-être, survenu au tournant du siècle en 1999. Cédric Klapisch imaginait le Paris de 2070 recouvert de sable et jouait déjà avec les membres d’une même lignée généalogique confrontés au temps et aux conséquences de leurs actes. La question de ce qui nous lie aux autres, au monde et à nous-mêmes, d’une manière générale, traverse tout le cinéma de cet auteur.
Dans La Venue de l’avenir, il envisage cette fois de faire dialoguer notre époque avec celle de 1895 en embarquant des cousins sur les traces d’une ancêtre commune née en 1873. Cet ambitieux récit (coécrit avec Santiago Amigorena) contient des séquences très réussies (les personnages qui se rencontrent et deviennent complices ; la découverte de coins de Paris encore champêtres ; le quartier de l’Opéra éclairé à l’électricité pour la première fois – bien que les faits datent de 1878, trois ans après la création du Palais Garnier) et des télescopages ludiques entre passé et présent. Il règne dans ce film une bonne humeur contagieuse, un appétit, une joie de faire revivre cette fascinante transformation du monde, qui explique par bien des aspects la frénésie de nos sociétés actuelles.
D'après Bande A Part