Elle et lui, perdus à Helsinki. Elle, seule dans son petit appartement, se laisse submerger par la hideur des nouvelles du monde, à la radio – à toute heure, l’attaque de l’Ukraine par la Russie, qui partage une longue frontière avec la Finlande... Et lui, seul avec son énième verre et la fin de sa jeunesse, sombre déjà dans l’alcoolisme – le destin de beaucoup d’hommes chez Kaurismäki. Le jour, la loi du marché les exclut tous les deux, inéluctablement. Mais, une nuit, ils vont se rencontrer, puis se plaire (un évènement absolu), puis se perdre, puis...
Au royaume de l’humour pince-sans-rire, le rapport est, cette fois, stupéfiant entre la profondeur de la mélancolie et la drôlerie irrésistible que le cinéaste parvient à y puiser. À l’image de cette scène où un groupe féminin entonne, sur le podium d’un bar, une chanson de son cru. Les paroles, d’une noirceur et d’un nihilisme sans limite, jurent avec l’orchestration de pop pimpante. La posture figée et inexpressive des chanteuses ajoute encore une touche incongrue. Fou rire garanti.
Le maître finlandais distille ces pépites comiques et euphémiques, qui ne ressemblent qu’à lui, d’un bout à l’autre des Feuilles mortes.
C’est touchant, brillant et nous fait nous sentir bien mieux au cinéma que nulle part ailleurs.
D’après Télérama